CHILD'S PLAY : LA POUPÉE DU MAL (2019) de Lars Klevberg [Critique]

Évaluation du dossier : 4/5 []

Karen, une mère célibataire, offre à son fils Andy une poupée ultra connectée de la marque Buddi. Mais elle ne sait pas que sur la chaîne de montage, l'ouvrier en charge de ce modèle, poussé à bout par son supérieur hiérarchique, s'est suicidé après avoir reprogrammé le jouet. Désormais en roue libre, l'IA de Chucky va révéler une nature sanguinaire et violente dont le jeune Andy et son proche environnement vont faire les frais...

Contredisant la plupart des pronostics qui annonçaient un reboot sans saveur, Child's Play : La Poupée du mal prend ses distances avec la saga originelle et s'avère moins désastreux que prévu. Bien au contraire...


Globalement perçue comme un énième projet de reboot foireux, l'annonce d'une nouvelle version de Jeu d'enfant avait déclenché une levée de boucliers du côté des fans de la première heure. Il faut reconnaître qu'ils sont nombreux à porter une vénération à Chucky et à ce qu'il représente : grosso modo l'antithèse absolue de l'enfance Bisounours et un fort symbole anticonformiste au majeur levé face au politiquement correct. Des plaintes naissaient également du fait que son créateur Don Mancini et sa voix historique Brad Dourif (7 films tout de même) n'étaient pas impliqués sur ce projet. Une mauvaise chose ? C'était sans compter sur la passion des producteurs David Katzenberg et Seth Grahame-Smith, déjà à l'origine de l'adaptation ciné de Ça et de la suite à venir du Beetlejuice de Tim Burton. Au vu du résultat final, il n'était visiblement pas question de faire dans la redite, ni dans le consensuel. Chucky 2.0 bénéficie d'un sérieux dépoussiérage et évolue dans un univers bien plus réaliste que la saga d'origine (la poupée possédée laisse la place à une intelligence artificielle en roue libre). Mais pas que...


Au-delà du cynisme mercantile toujours présent en toile de fond, le scénario de Tyler Burton Smith nous interroge aussi, via la nature profonde de Chucky, sur les limites de l'intelligence artificielle et sa potentielle nocivité en cas de perte de contrôle. Des problématiques déjà explorées par Cameron, Kubrick et Spielberg. On pense d'ailleurs souvent à A.I. intelligence artificielle et son enfant robot David, condamné à l'échec face à une humanité insaisissable, impossible à réduire à de vulgaires lignes de code. Ici, la trajectoire psychologique de Chucky en a la même portée tragique, cette complexité humaine déroutante, justifiant le glissement du sympathique pantin, désormais sans filet, vers des comportements meurtriers alors que son unique but est de rendre son propriétaire heureux.

Child's Play : La Poupée du mal mise sur les influences années 80. On pense d’abord au cinéma catastrophe, référencé, impertinent et drôle du trop rare Joe Dante (des Gremlins à Small Soldiers) ainsi qu’à Stephen King qui avait déjà développé ce type de concept dans Maximum Overdrive. Mais c’est surtout Steven Spielberg, Amblin et tout particulièrement E.T., l'extra-terrestre que l’on perçoit dans ce reboot, que ce soit dans l'attachement qu'entretiennent au départ l'enfant et la poupée, tous deux solitaires, dans certaines actions du pantin, notamment lorsqu'il communique avec les objets connectés, ou encore dans son aspect film de potes.


Au casting, on retrouve Aubrey Plaza (Scott Pilgrim) dans le rôle de la mère cool submergée par son travail et le jeune Gabriel Bateman (Annabelle, Dans le noir) dans le rôle de son fils Andy, isolé et marqué par le départ de son père qui va débuter une véritable complicité avec la poupée. C'est cette fois Mark Hamill (Star Wars, Le Village des damnés) qui prête sa voix au pantin (en V.O.). Le rôle du gentil flic maltraité revient à Brian Tyree Henry (Spider-man: New Generation, Sans un bruit 2) et celui de l'insupportable beau-père à David Lewis (Man of Steel, Unspeakable).

Du calibre de ces remakes pas attendus et qui pourtant vous retournent la tête, tels La Colline a des yeux, Massacre à la tronçonneuse, Evil Dead ou encore plus récemment, Halloween et SuspiriaChild's Play: La Poupéee du mal peut déstabiliser avec son héros méconnaissable, mais on se fait rapidement à ce nouveau physique, le dynamisme du récit prenant vite le pas sur les considérations esthétiques. De nombreux éléments de la saga d'origine sont conservés, les meurtres graphiques, l'humour noir, le doute sur la culpabilité d'Andy, le consumérisme, mais enrichi d'une dimension psychologique innovante et complexe où Chucky démarre comme l'égal d'Andy. Ces deux êtres solitaires qui ne rentrent pas dans le moule et qui se sont trouvés vont suivre leur trajectoire, mus par des objectifs différents qui vont finalement les séparer. Cependant, coupant le cordon ombilical avec le concept original, on peut se demander pourquoi les producteurs ont pris le risque de braquer les fans hardcore plutôt que proposer un film à part entière, de type A.I. intelligence artificielle version slasher. La porte n'est pas fermée de ce côté puisque le réalisateur a évoqué son envie de développer cet univers non pas en multipliant les aventures du pantin sociopathe mais en s'intéressant cette fois aux Buddi Bears. Et, au fond, on ne peut pas leur en vouloir tant le résultat est jubilatoire et offre enfin quelque chose qui manque cruellement en salle ces dernières années dans le genre qui nous intéresse : du fun, de l'audace et un bain de sang. Nous voici servis.
N.F.T.


EN BREF
titre original : Child's Play
distribution : Aubrey Plaza, Mark Hamill, Gabriel Bateman...
pays d'origine : France / Canada / États-Unis
budget : N.C.
année de production : 2019
date de sortie française : 19 juin 2019
durée : 90 minutes
adrénomètre : ♥
note globale : 4/5


 † EXORCISME †
Gore
▲ Drôle
▲ Concept de base enrichi


 - DÉMYSTIFICATION -
▼ Le changement de visage
▼ Possibilité de film hors saga Chucky
▼ Exit Mancini et Dourif

LE FLIP 
Un pantin psychopathe prend le contrôle d'objets connectés...

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Jeu d'enfant
La Malédiction de Chucky
Le Retour de Chucky


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