[Critique] AMERICAN HORROR STORY (TV - 2011/2012) de Ryan Murphy et Brad Falchuk - Saison 1

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La famille Harmon, composée d'un psychiatre volage, de sa femme meurtrie par l'adultère et une récente fausse couche et de leur fille en pleine crise d'adolescence, s'installe à leur insu dans un manoir hanté. Là, les esprits rôdent autour d'eux et sont bien décidés à leur montrer qui tient les rênes dans cet endroit,  les confrontant ainsi à leurs plus grandes peurs...

Rarement, pour ainsi dire jamais, série, dans le sens de feuilleton télévisé, ne s'était à ce point acoquinée avec l'épouvante, tout en lui offrant un emballage digne d'un long métrage.
Si on peut toutefois retenir le très réussi The Walking Dead (2010) et bien plus tôt American Gothic (1995) et Twin Peaks (1990), on se souviendra aussi de quelques épisodes aux qualités moins constantes comme Supernatural (2005), X-Files (1993), La Quatrième dimension (1959), Les Contes de la Crypte (1989), mais aussi les fameuses Histoires Singulières (1984) de la Hammer, et sa légendaire histoire de famille qui se retrouve emmurée dans sa propre maison, traumatisant une génération de fantasticophiles en devenir, lors de leur diffusion à l'époque sur FR3, où même Alfred Hitchcock Présente (1955/1985) et Le Voyageur (1983) et leurs histoires bizarres... Bref, le genre s'est déjà largement répandu dans le monde de la télévision, mais rarement avec un soin aussi évident et à tous les niveaux. À commencer par son générique réalisé par Kyle Cooper, via la société "Prologue", déjà responsable de celui de Seven, associé à la musique de James S. Levine, proche des univers doucement inquiétants d'Angelo Badalamenti. Pour cela, American Horror Story parvient à imposer une certaine légitimité dans le paysage télévisuel.

Le scénario se concentre sur une famille déchirée, en voie de rédemption, qui déménage à Los Angeles dans une demeure de type victorienne où les actes les plus horribles se sont accumulés depuis 90 ans, et régulièrement visitée par ses fantômes. Ainsi, au lieu de se reconstruire, la famille finit par voir ses problèmes empirer. Enrichie de flashbacks qui permettent progressivement de recoller les morceaux du puzzle -de la famille et de la maison- l'histoire trouve souvent son inspiration dans la réalité. De manière détournée on évoque aussi bien l'affaire O.J. Simpson en 1994 et Colombine en 1999, que celle du Dahlia Noir en 1947, du bébé Lindbergh en 1932 ou du tueur en série Richard Speck (R.(Speck) Franklin dans la série) et le massacre des étudiantes en médecine en 1966... Des sauts dans un passé qui fait partie intégrante de l'Amérique, et trouve un étrange écho chez les fantômes de cette maison, qui peuvent, selon leur bon vouloir, apparaître et agir, face aux vivants, se gardant bien de leur dire qui ils sont, enfin quand ils le savent... Le spectateur découvre donc, au fil de l'histoire, souvent bien avant les personnages, qui est réellement vivant, bien que la mort semble le cerner et qui est mort, alors qu'il agit tel un vivant, avec ses problématiques, ses psychoses et ses contradictions. Des contradictions anthropomorphiques qui se répercutent sur l'aspect global de la série jusqu'à donner l'impression lors de sa conclusion, d'adopter les atours du film à sketch horrifique, étendu avec une facilité déconcertante sur près de 9 heures.


Le principal problème de cette maison semble trouver sa source à la cave, atelier d'un chirurgien fou et accro à l'éther, adepte de l’avortement clandestin et tellement fou de chagrin lorsque son enfant sera assassiné, qu'il tentera, tel Frankenstein, de le ramener à la vie, donnant naissance à un monstre, l'Infantata. Depuis l'affaire Montgomery, les meurtres violent s'accumulent, au point que le lieu semble animé par sa propre routine, un engrenage fatal initié par la main de l'homme et dont la maison aurait pris le relais en toute autonomie. Et ses fantômes, parfois vagues réminiscences d'un passé sordide, d'autre fois aussi réels que les vivants, peuvent désormais agir sur la réalité. Un parti pris intéressant niveau suspense puisque le spectateur reste souvent longtemps sans savoir à quel type de personnage il a à faire.

Malgré son format télévisuel, American Horror Story offre des scènes d'horreur assez graphiques, d'excellents maquillages, des effets bien gores, de type corps démembrés ou dégustation de cervelle animale crue... tout comme quelques scènes de frousse principalement causées par une ambiance morbide et mystérieuse parfaitement entretenue. Question réalisation, on apprécie le soin apporté à l'image et a la mise en scène, rendant hommage à l'énorme travail des décorateurs, à tel point qu'on se croirait souvent devant un long métrage de cinéma.

Le casting est de choix, la remarquable Frances Conroy issue de Six feet Under est de la partie (tout comme sa voix en VF) et offre un personnage troublant, doté d'un double plus jeune, terriblement sexy et aguicheur, interprété par Alexandra Breckenridge qui n'est pas sans évoquer une Audrey Horne délurée, du moins pour ceux qui ont vu Twin Peaks. L'Infantata est joué par un Ben Wolfe, digne des plus célèbres "tronches" du cinéma d'épouvante. Tate, le blondinet aussi charmeur que perturbé interprété par Evan Peters (Kick Ass) entretient pour sa part une ressemblance frappante avec Malcolm McDowell dans Orange Mécanique. La famille Harmon, un trio constitué de la jeune Taissa Farmiga, de Connie Britton (à ne pas confondre avec la playmate Connie Brighton), une habituée des séries télé, notamment vue dans Spin City mais aussi au cinéma dans le remake des Griffes de la Nuit et Dylan McDermott (Les Messagers), fonctionne à merveille. On retrouve par ailleurs quelques invités bien sentis tels Jessica Lange (King Kong), l'étonnante Jamie Brewer, atteinte du syndrome de Down ou encore Christine Estabrook déjà croisée dans les séries Desperate Housewives et Six Feet Under.
 

Généreux en références au cinéma d'épouvante, on peut retenir par exemple La Maison du Diable, Shining, Sixième Sens, ou encore Paranormal Activity, Les Autres... Les connaisseurs sont donc en terrain connu, tous comme les plus mélomanes qui reconnaîtront les thèmes directement empruntées à des classiques du genre tels Insidious, Psychose, ou Dracula.

Malgré ses multiples références American Horror Story demeure une série très homogène, chaque épisode se suit avec intérêt. Elle offre des moments d'angoisse, des moments plus orientés horreur graphique, des hommages au genre, sachant prélever le meilleur de son vivier, et parvient à mélanger tragédie, légèreté et épouvante avec brio. Si ses thématiques jonglent sans arrêt avec des concepts et leurs contraires (colère et sérénité, vengeance et pardon, pureté et vice, naissance et mort), tout s'entremêle naturellement jusqu'à la résolution finale lors des deux derniers épisodes. Et lors d'une conclusion touchante, ce sont les morts qui semblent rappeler que pour eux, comme pour nous, si histoire et destin tragique semblent condamnés à se répéter, il n'est jamais trop tard pour briser le cercle et enfin sortir des ténèbres.

La saison 2 basée sur une nouvelle histoire, reprend une partie du casting dans de nouveaux rôles et semble d'après les premiers commentaires récoltés, bien supérieure à cette première saison pourtant déjà bien réussie. Décidément, American Horror Story n'a pas fini de nous surprendre.


EN BREF
titre original : American Horror Story
pays d'origine : États-Unis
année de production : 2011
date de sortie française : 24 octobre 2012 (DTV)
durée : 540 minutes
adrénomètre : *
Note globale : 3.5/5

† HANTISE
▲ Nombreuses références au genre
▲ Le casting
▲ Horreur graphique malgré le format série

-  DÉMYSTIFICATION -
▼ Impression de film à sketches de 9 heures
▼ Thématiquement surchargé
▼ Mélange des genres risqué

LE FLIP
L'infantata

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Twin Peaks
Shining
Insidious

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