COLD GROUND (2017/2018) de Fabien Delage [Critique]

Évaluation du dossier : 3.5/5 []

En 1976, un couple de journalistes se rend à la frontière franco-suisse pour tourner son premier reportage TV consacré à d'étranges cas de mutilation de bétail. Une fois sur place, l'équipe de chercheurs qui devait les accueillir manque à l'appel. Accompagnés d'un secouriste, d'une biologiste britannique et d'un enquêteur de police américain, Melissa et David vont partir à la recherche du groupe de disparus, au cœur de la montagne...

Après La Rage du démon, Fabien Delage revient avec un found footage glaçant, mixant monster movie et survival dans les Alpes enneigées.

En véritable artisan du genre, brodant avec des budgets dérisoires, Fabien Delage poursuit sa route aux frontières du réel en livrant un nouveau found footage. Une démarche qu'il serait malavisé de qualifier d'opportuniste à l'heure où le sous-genre est bel et bien passé de mode. Au contraire, la démarche semble aujourd'hui plutôt audacieuse tant on a le sentiment d'avoir à peu près tout vu en la matière, des fantômes revêches aux zombies survoltés et pas mal de péloches mal fichues ou qui n'ont rien de neuf à raconter. Avec pour bagage une expérience non négligeable en la matière, puisqu'on lui doit déjà la passionnante série d'urbex horrifique, Dead Crossroads et sa suite Dead Crossroads : Les Dossiers interdits ainsi que le documenteur La Rage du démon, le jeune cinéaste affiche une fois encore son goût pour les ambiances angoissantes, voire malsaines et sa volonté farouche à inscrire son travail à un fort degré de réalité.


Dans Cold Ground qu'il écrit et réalise, Fabien Delage nous plonge au cœur de l'enquête conduite par Melissa, interprétée par Gala Besson (Horsehead) et David joué par Geoffrey Blandin, également directeur photo, déjà aux côtés de Fabien Delage sur Dead Crossroads : Les Dossiers interdits. Le couple de journalistes se lance à fond sur ce premier reportage qui part de mutilations d'animaux observées dans les massifs enneigés à la frontière franco-suisse. Les tourtereaux demandent à suivre l'expédition qui rejoint un campement scientifique chargé d'étudier les mystérieux phénomènes climatiques de Cold Ground, qui pourraient être reliés aux cadavres de bêtes dépecées.

Minute après minute, la tension monte et Cold Ground dévoile progressivement ses cartes. La première est dans son choix esthétique : retravailler l'image pour lui donner un aspect vintage. D'aucuns diront qu'aujourd'hui la technologie permet justement de nettoyer ces vieilles bandes, mais le côté found footage et la volonté d'authenticité ne passe pas forcément par le syndrome "La Guerre en couleurs". Le choix est donc judicieux et plutôt efficace. Ensuite, et c'est là la véritable réussite de Cold Ground, le calvaire des protagonistes exposés au froid est ultra crédible. De la neige qui s'étale à perte de vue sur leur parcours, aux petits trucs pour se réchauffer, on partage sans mal leur calvaire. Immense et paradoxalement claustrophobique, la montagne est un danger à part entière, aussi peuplée par un mal qui va se faire plus menaçant au fil des nuits. Ce sont autant d'occasions d'offrir au spectateur des séquences d'effets spéciaux pour l'essentiel à l'ancienne, signés David Scherer (Les Garçons sauvages, L'Étrange Couleur des larmes de ton corps), brèves mais réjouissantes. On peut relever à ce titre une séance d'amputation éprouvante et des attaques  violentes dont on ne dévoilera rien. On pense forcément au Projet Blair Witch en mode congélation avec ces vastes forêts et les nuits agitées des personnages, mais aussi à des survival en pleine nature du calibre de The Descent.


Tourné en 10 jours avec une équipe réduite à moins de 20 personnes, dans des décors naturels à 2000 m d'altitude, on imagine sans mal l'intensité d'un tournage qui n'a pas été ménagé par la météo, les intempéries ayant notamment poussé David Scherer à travailler à l'arrière d'un camion qui finira par tomber en panne. On s'amuse parfois aussi, lorsque le récit joue avec l'Histoire et témoigne de l'invention d'un plat bien connu aujourd'hui. Impossible non plus de ne pas évoquer l'édition DVD d'excellente facture, éditée par Cine 2 Genre flanquée d'une saisissante illustration signée Justin Osbourn et qui contient en double programme The Legend of Boggy Creek de Charles B. Pierce. Jusqu'alors inédit sur notre territoire, ce documentaire multidiffusé chez l'oncle Sam a marqué à tel point le duo Myrick et Sanchez que sans lui, il n'y aurait probablement pas eu de Projet Blair Witch.

Alors certes, on pourra chipoter et trouver à redire, sur quelques problèmes de justesse dans l'interprétation ou sur la linéarité du récit, mais on reste dans les balises du found footage, avec une volonté visible – et rare – de justifier l'usage de la caméra. S'il est désormais quasi impossible de détrôner les classiques du genre que sont Le Projet Blair Witch ou encore [Rec], Cold Ground vient les tutoyer avec une certaine insolence, s'affirmant comme un pur found footage de fan, avec la modestie que cela induit, qui reprend les codes du sous-genre et se passionne pour son sujet. Ce qui explique que le résultat soit souvent efficace, flippant et surtout glaçant : c'est bien simple, vous pouvez sortir les doudounes, car vous allez vous les geler pendant 1 h 30...
N.F.T.



EN BREF
titre original : Cold Ground
distribution : Doug Rand, Gala Besson, Philip Schurer, Maura Tillay, Fabrice Pierre
pays d'origine : France
budget : Petit
année de production : 2017
date de sortie française : 13 août 2018 VOD - 18 décembre 2018 (DVD - Ciné 2 Genre)
durée : 86 minutes
adrénomètre : ♥♥
note globale : 3.5/5

† EXORCISME †
▲ Glaçant dans tous les sens du terme
▲ Effets spéciaux à l'ancienne
The Legend of Boggy Creek en double programme

 - DÉMYSTIFICATION -
▼ Déconseillé au public sensible à la caméra "parkinson"
▼ Récit linéaire
▼ Des petites faiblesses d'interprétation

LE FLIP

L'héroïne cernée par ses assaillants au fond d'une grotte...

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Evidence
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