[Critique] 10 CLOVERFIELD LANE (2016) de Dan Trachtenberg

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Une jeune femme se réveille dans une cave après un terrible accident de voiture. Ne sachant pas comment elle a atterri dans cet endroit, elle pense tout d'abord avoir été kidnappée. Son gardien tente de la rassurer en lui disant qu'il lui a sauvé la vie après une attaque chimique d'envergure. En l'absence de certitude, elle décide de s'échapper...
Peu loquace sur 10 Cloverfield Lane dont le grand public ne découvrira l'existence que deux mois avant sa sortie par le biais d'un trailer enthousiasmant, J.J. Abrams (Super 8) et son studio Bad Robot revient après Star Wars - Le Réveil de la forcepersonne ne l'attendait vraiment.
Fort d'un secret jusqu'alors soigneusement gardé qui s'assure de bénéficier de tout le savoir-faire en matière de marketing du dépoussiéreur de franchises intergalactiques commençant par "Star", le bonhomme coiffe ici la casquette de producteur et réussit un coup de buzz essentiellement alimenté par l'effet de surprise.

Et au terme de quelques réajustements du script, ce thriller en huis clos légèrement saupoudré d'une science-fiction malheureusement trop discrète finit par marquer une vague proximité, mais revendiquée, avec le remarquable Cloverfield de Matt Reeves (Laisse-moi entrer). Pour ceux qui auraient vécu sur Mars à cette époque, il s'agit de l'un des found footage avec [Rec], Diary of the Dead et Paranormal Activity, qui inauguraient la grosse déferlante que l'on allait connaître et parfois même subir, telle la malédiction d'un miroir brisé, les sept années suivantes. Heureusement, 10 Cloverfield Lane impose son propre style et ne cherche pas à marcher dans les pas de son prédécesseur. À tel point qu'on se demande pourquoi faire correspondre ces œuvres alors qu'elles n'entretiennent qu'un lien au final très ténu.


Le found footage, qui rendait ultra-immersive cette histoire d'attaque extraterrestre vécue de l'intérieur par un groupe de fêtards new-yorkais, cède ici la place à une mise en scène classique au service d'une histoire plus intimiste. On délaisse la métropole et les vagues d'attaques extraterrestres pour s'enfermer dans un bunker construit en pleine campagne, au milieu de nulle part, par un redneck parano qui se protège d'un mal extérieur dont nous ne savons pas grand-chose.

Avec une unité de lieu réduite à son strict minimum qui le rapproche du théâtre, la principale réussite des deux premiers tiers de 10 Cloverfield Lane tient principalement à la performance de son casting. On retrouve en tête le remarquable John Goodman (Arachnophobie, Barton Fink, The Big Lebowski) dans le rôle du charismatique et paranoïaque Howard. Michelle, héroïne qui s'ignore, est incarnée par une Mary Elisabeth Winstead convaincante (Le Cercle 2, Destination finale 3) dont la capacité à se défendre et à combattre Howard, traité comme l'arbre qui cache la forêt, la blindera pour l'ultime épreuve extérieure. John Gallagher Jr., essentiellement issu de la série, complète ce trio de choc et apporte une petite touche de fraîcheur et de positivi dans ce tableau pour le moins assombri à mesure qu'il se dessine.

La réalisation très soignée de Dan Trachtenberg séduit dès les premières images. Ce nouveau venu dans le monde du long-métrage peaufine images et plans séquences et offre au passage ce qui sera sans doute l'un des génériques les plus percutants de l'année. Rapidement, l'idée s'impose que le metteur en scène bien qu'inconnu du grand public, sait parfaitement créer et maintenir l'intensité nécessaire pour rendre ce huis clos tout à fait immersif.


Quelques impairs viennent toutefois assombrir cette étude comportementale en conditions extrêmes et on regrette notamment que certains arcs narratifs ne soient pas complètement exploités. Citons en exemple, sans trop en dévoiler, cette mystérieuse affaire qui tourne autour de la photo d'un membre de la famille d'Howard et en dépit des réactions que cela va entraîner et donc de l'importance suggérée de l'intrigue – nous n'aurons pas plus de précisions à ce sujet. Le scénario demeure globalement ingénieux et parvient à maintenir l'attention, même en huis clos avec seulement trois personnages. Toutefois, les choses se compliquent un peu en fin de métrage, notamment lors d'un affrontement final un peu trop facilement expédié.

Enfin, il est regrettable qu'après un tel laps de temps passé en sous-sol, on reste un peu sur notre faim question science-fiction – le fameux lien ténu avec Cloverfield que tout le monde attend – le genre étant ici à peine effleuré. En effet, 10 Cloverfield Lane aurait sans doute gagné à en mettre un bon coup dans les mirettes dans son dernier tiers. Qu'à cela ne tienne, ses qualités viennent contrebalancer sans problème ses défauts et l'ensemble s'affirme comme une fable redoutable et cruelle sur la nature humaine et ses travers qui condamnent l'humanité à périr de sa propre main, quelles que soient les conjectures. Toutefois, loin de dresser un tableau complètement négatif, le métrage s'achève sur l'impression qu'il n'a pas encore tout dit et l'on attend de pied ferme la suite des évènements.
N.T. 
EN BREF
titre original : 10 Cloverfield Lane
pays d'origine : États-Unis
budget : 15 000 000 $
année de production : 2016
date de sortie française : 16 mars 2016
durée : 103 minutes
adrénomètre : ♥
note globale : 3.5/5

† EXORCISME †
▲ Réalisation soignée
▲ Huis clos immersif
▲ Le générique de début

- DÉMYSTIFICATION -
▼ L'aspect science-fiction sous-exploité
▼ Certains arcs narratifs négligés
▼ Affrontement final expédié

LE FLIP
Une femme veut entrer dans le bunker alors qu'une autre veut en sortir...

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