[Critique] INTRUDERS (2011/2012) de Juan Carlos Fresnadillo

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Deux enfants, Juan en Espagne et Mia en Angleterre, son persécutés par un intrus sans visage et terrifiant. Chaque nuit, sa présence devient de plus en plus oppressante et l’angoisse atteint son paroxysme quand leurs parents deviennent eux aussi témoins de ces apparitions. 

Intruders annonce la couleur dès son ouverture, offrant au spectateur une introduction extrêmement tonique, voire cauchemardesque, durant laquelle un môme et sa mère sont agressés par une entité sombre et déterminée, réalisée en CGI, évoquant immanquablement la faucheuse de Fantômes contre Fantômes de Peter Jackson.

Juan Carlos Fresnadillo, réalisateur d'Intacto en 2001, mais surtout du sublime 28 Semaines plus Tard, une suite qui surpassait alors le film, déjà brillant, de Danny Boyle, choisit, et surtout parvient, grâce à son talent de conteur, à faire constamment osciller le spectateur entre croyance en un vrai croque-mitaine et la probabilité d'une simple hallucination. Intruders rénove, au passage, le thème des terreurs nocturnes et autres peurs enfantines et joue principalement de son argument fantastique pour semer le trouble dans la tête du spectateur en faisant perdurer le mystère qui entoure cet étrange boogeyman.


La photographie de Enrique Chediak (The Faculty, 28 semaines plus tard) est splendide, idem pour la musique de Roque Baños qui navigue entre pièces mélancoliques évoquant Eric Satie, et illustrant à merveille le combat d'un croque-mitaine qui ne veut pas tomber dans l'oubli, et les morceaux plus atmosphériques aux chants envoûtants, proches de l'univers de Bruno Coulais. Côté casting, aucune fausse note n'est à déplorer non plus, de Clive Owen (Les Fils de l'Homme, Sin City), Carice van Houten (Dorothy, Game of Thrones) et Pilar López de Ayala (Obaba, le Village du Lézard Vert) en parents totalement dépassés par la situation, en passant par Daniel Brühl, (Eva , Inglorious Basterds), sans oublier les deux jeunes acteurs, Izán Corchero et Ella Purnell (Kick-Ass 2), qui portent sur leurs épaules une bonne partie de la crédibilité du film.

Pour entrer dans Intruders et en saisir toute la subtilité, il faut en accepter les points de vue volontairement faussés et les différentes pistes narratives, alimentant un argument fantastique culminant à son degré maximal, mais ayant pour unique but de renforcer le propos allégorique du film. Le métrage jouant volontiers de la métaphore pour, sans trop en dire, aborder le thème des traumas de l'enfance, parfois amplifiés par un trop plein d'imagination, enfouis mais toujours prompts à surgir de sous votre lit pour agripper votre cheville, le tout sur fond de transmission intergénérationnelle. Ainsi, Juan Carlos Fresnadillo livre une œuvre personnelle, mêlant subtilement réalisme et poésie, couplé à une puissance dramatique qui fait mouche et n'a rien à envier à certaines productions Guillermo Del Toro, Don't be Afraid of the Dark, en tête, ni à M. Night Shyamalan dans l'utilisation de la shaky cam pour élaborer des plans subjectifs immersifs et renforcer la proximité avec le spectateur lors des moments de fort suspense.


Le conte, sa transmission et son influence constituent l'ossature thématique de ce film puisque le réalisateur s'ingénie constamment à en démontrer le pouvoir : celui d'exorciser ses démons lors de l'écriture, de se risquer à les réveiller ou d'en créer de nouveaux lors de la lecture, le croque-mitaine s’immisçant de cette manière, insidieusement, dans de nouveaux esprits afin de les posséder. D’ailleurs parler d'un monstre sans visage permet au final d'y greffer l'ensemble ces phobies qui tourmentent l'esprit des hommes, de génération en génération et ce, depuis la nuit des temps.

Intelligent, angoissant, offrant un twist habile, même s'il souffre d'un rythme irrégulier et que l'épouvante y est au final peu présente, un comble pour un film dédié aux terreurs enfantines,  Intruders demeure un thriller fantastique dense et plus complexe qu'il n'y paraît puisqu'il demande un vrai effort au spectateur pour en accepter les rouages narratifs et paradoxalement, nécessite de se laisser guider sans aucune résistance, pour en saisir toute la subtilité allégorique. Attention toutefois à bien privilégier la version originale puisque la VF ne souligne pas la différence géographique entre la partie anglaise et la partie espagnole et affaiblit l'impact du métrage.
N.T.

EN BREF
titre original : Intruders
pays d'origine : États-Unis / Royaume-Uni / Espagne
année de production : 2011
date de sortie française : 11 janvier 2012
durée : 100 minutes
budget : 13 000 000 $
adrénomètre : ♥
note globale : 3.5/5

† HANTISE
▲ Complexe
▲ Intelligent
▲ La photographie

-  DÉMYSTIFICATION -
▼ Problème de rythme
▼ Privilégier la VO
▼ Peu d'épouvante

LE FLIP
Réfugié sur un échafaudage, Juan tente d’échapper au croque-mitaine.

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