[Critique] I AM THE PRETTY THING THAT LIVES IN THE HOUSE (2016 - VOD) d'Oz Perkins

Évaluation du dossier : 4/5 [♥]

Une infirmière naïve et facilement impressionnable doit s'occuper d'une romancière d'horreur en fin de vie recluse dans une vieille maison pleine de secrets...


Deuxième réalisation de l'acteur, scénariste et désormais metteur en scène Oz Perkins, I am the Pretty Thing That Lives in the House vient confirmer encore un peu plus le talent du fils aîné d'Anthony Perkins qui, en deux œuvres seulement, impose un cinéma d'auteur chiadé et audacieux.

Après un February surprenant, Oz Perkins revient à la charge avec cette production Netflix. Au risque de s'attirer une nouvelle fois les foudres des amateurs de cinéma "traditionnel" ou de jump scares effrénés puisqu'il livre une ghost story en immersion racontée par des fantômes, lente et minimaliste dans sa construction. En effet, l’œuvre baigne dans une atmosphère oppressante qui se rapproche davantage de la suggestion des Innocents que de la frénésie d'un Friend Request.


Voilà le public averti. Réalisateur particulier, hors norme et hors mode, Oz Perkins rompt une nouvelle fois avec les codes de l'épouvante populaire actuelle. D'entrée, son cinéma s'expose à des réactions extrêmes du public : on aime ou on déteste. Il convient donc d'aborder cette œuvre minimaliste avec une certaine ouverture d'esprit pour en apprécier toutes les saveurs.

Certes, en supprimant les jump scares, on y perd en dynamisme mais on y gagne en atmosphère macabre comme savaient les construire les grands maîtres du genre comme Jack Clayton (Les Innocents) et Mario Bava (Les Trois visages de la peur). Il peut toutefois être rangé aux côtés de ses contemporains tels Kiyoshi Kurosawa (Kaïro), Nicholas McCarthy (The Pact) ou Ti West (The Innkeepers). La comparaison est bien méritée car I am the Pretty Thing That Lives in the House contient ni plus ni moins que l'une des plus belles séquences d'ouverture du cinéma d'épouvante depuis des années. Une voix off monotone, usée, fatiguée, annonce la couleur et conditionne déjà le spectateur à l'expérience qui l'attend : "Une maison ayant connu la mort ne peut plus être achetée par les vivants mais empruntée aux fantômes qui y demeurent encore". Puis, l'apparition spectrale et vaporeuse d'une femme sur fond noir apporte une dimension supplémentaire, anxiogène à cette mise en bouche glaçante.


Nous découvrons ensuite les histoires de Lily, la jolie créature qui vit désormais dans la maison, d'Iris Blum la vieille femme sénile en contact avec Polly, spectre qui hante les lieux. Sous forme de destins croisés, on nous narre la difficile condition des fantômes et leur cohabitation forcée avec les vivants. Et ceux-ci dépassent largement du cadre fictionnel notamment lorsque Lily et Polly visionnent La Loi du seigneur dans lequel  Anthony Perkins fait sa première apparition au cinéma. Le futur interprète de Norman Bates est aussi l'interprète de la chanson "You Keep Coming Back Like a Song" la "'berceuse" d'Iris Blum qui revient de manière récurrente. La musique est vraisemblablement une affaire de famille puisque le frère d'Oz, Elvis Perkins, est à l'origine de la bande originale si particulière, aux sonorités aussi mystérieuses qu'angoissantes.

Œuvre esthétique réussie, magnifiée par la photographie de Julie Kirkwood, qui s'inspire habilement du cinéma classique et de la littérature, I Am the Pretty Thing That Lives in the House sort des sentiers (re)battus et demandera un vrai effort de la part du public pour en tirer toutes les qualités. On regrette toutefois que devant une intrigue aussi épurée et un brin mollassonne, beaucoup de questions restent sans réponses à la fin. Mais la narratrice avait prévenu, les fantômes ne révèlent que ce qu'ils veulent, excepté la fin qu'ils ne peuvent ou veulent raconter. Et c'est sans doute là le prix à payer pour bénéficier pleinement de cette expérience peu commune née de l'esprit torturé d'un cinéaste singulier, en marge de la production actuelle. Et cela ne peut pas faire de mal.
N.F.T.


EN BREF
titre original : I Am the Pretty Thing That Lives in the House
distribution : Ruth Wilson, Bob Balaban, Lucy Boynton, Paula Prentiss, Brad Milne...
pays d'origine : États-Unis / Canada
budget : petit
année de production : 2016
date de sortie française : 28 octobre 2016 (VOD - Netflix)
durée : 89 minutes
adrénomètre : ♥
note globale : 4/5

† EXORCISME †
▲ Séquence d'ouverture
▲ Traitement original
▲ L'esthétique des fantômes

- DÉMYSTIFICATION -
▼ Manque de peps
▼ Lent
Peu d'explications à la fin

LE FLIP
Le fantôme de Polly.

LIRE AUSSI
The Innkeepers
La Maison du Diable
February


Commentaires

En cours de lecture