LES RÉVOLTÉS DE L'AN 2000 (1976/1977) de Narciso Ibáñez Serrador [Critique]

Évaluation du dossier : 5/5 []

 

Un couple d’Anglais, Tom et Evelyn, débarque dans la station balnéaire de Benavis pendant les festivités d’été. Préférant fuir la foule, ils prévoient de partir le lendemain pour la petite île d’Almanzora, ignorée des touristes. Mais à leur arrivée, ils découvrent un village abandonné de ses habitants. Et si les enfants avaient quelque chose à voir avec la disparition de la population adulte ?


Enfin disponible sur notre territoire en Blu-ray, Les Révoltés de l'an 2000 bénéficie, de surcroît, sous l'égide de l'éditeur Carlotta Films, de sa version originale en anglais et espagnol. Il n'y a donc plus aucune raison de ne pas (re)découvrir ce petit bijou du fantastique ibérique.

Narciso Ibáñez Serrador ouvre Les Révoltés de l'an 2000, traduction très cavalière de ¿Quién puede matar a un niño?, sur des images d'archives de conflits en tous genres où les enfants sont maltraités, affamés, blessés... Il nous rappelle ainsi qu'ils sont souvent les premières victimes collatérales des guerres d'adultes. Une contextualisation souvent insoutenable mais nécessaire pour conférer à l'œuvre toute sa force et offrir un semblant de mobile à la folie meurtrière qui s'abat sur la petite île d'Almanzora. Si l'on comprend plus tard que le mode de transmission de ce "virus" se propage lorsque les enfants sont en contact (voir la scène de contamination à l'autre bout de l'île) on n'en sait au final pas beaucoup plus. La bonne nouvelle étant que cette information n'est pas forcément utile pour appréhender le long-métrage dans sa globalité.


Si le titre français pouvait, à la rigueur, faire flirter l'ensemble avec la science-fiction, tendance apocalyptique, il faut bien admettre que dans les années 2020, l'impact futuriste du titre s'est fait la malle depuis belle lurette. Il est donc plus intéressant de se concentrer sur le titre original ¿Quién puede matar a un niño? donc, beaucoup plus explicite sur la note d'intention réelle du réalisateur. En effet, dans la grande veine des films d'enfants tueurs, ou maléfiques, ou les deux (puisque dans les années 70, il existe déjà quelques perles du genre telles que L'Autre de Robert Mulligan, L'Exorciste de William Friedkin ou encore La Malédiction de Richard Donner), le film interroge ici cette frontière opaque qui sépare la légitime défense et le recours à l'acte le plus abominable qui soit : tuer un enfant. La force du propos étant décuplée d'un côté par le fait qu'il s'agit d'un couple de parents, dont la maman porte son futur troisième mais aussi, de l'autre côté, par cette fameuse introduction apportant une justification au comportement meurtrier des gamins.



Adaptant le livre de Juan José Plans "El juego de los niños", Narciso Ibáñez Serrador prend son temps pour installer son intrigue et, alors que l'on est doucement en train de se remettre de la violence de l'introduction, il préfère jouer avec les atmosphères plutôt qu’enchaîner les images choc. Il soigne ses images et offre un décor de vacances parfaitement idyllique, dans un petit village espagnol typiquement méditerranéen, ce qui a pour conséquence de renforcer le malaise lorsque les choses dégénèrent. La photographie est signée José Luis Alcaine, que l'on retrouvera souvent aux côtés de grands cinéastes espagnols comme Pedro Almodovar ou Bigas Luna, pour qui le plus difficile sera son travail d'étalonnage de la lumière puisque l'on ne devait pas remarquer les différents lieux de tournage extérieur qui pouvaient alterner d'un plan à l'autre.


Vengeance, traumatisme, revanche de la nature, le mobile reste flou et n'ira pas plus loin que le peu d'éléments fournis par le réalisateur. Mais l'essentiel du film tient surtout à la question de son titre original. Jusqu'à quel point pouvons-nous nous laisser faire face au sentiment de culpabilité et à un enfant meurtrier ? Chacun placera son propre curseur, sachant qu'il s'agit du concept même de l'innocence qui est ici mis à mal. Celle des enfants qui s'en servent désormais comme une arme de destruction massive, ou encore celle des adultes à la base pacifistes, ici traqués comme des bêtes innocentes, jusqu'à devenir à leur tour des meurtriers. On trouve donc un véritable jeu de miroir morbide dans cette innocence bafouée qui passe des bourreaux aux victimes, tel un virus létal.
N.F.T.




EN BREF 
titre original : ¿Quién puede matar a un niño?
titre anglais : Who can kill a child?
distribution : Lewis Fiander, Prunella Ransome, Antonio Iranzo...
pays d'origine : Espagne
budget : N.C.
année de production : 1976
date de sortie française : 2 février 1977 - Reprise le 12 août 2020 - 16 septembre 2020 (Blu-ray & DVD Carlotta)
durée : 112 minutes
adrénomètre : ♠ 
note globale : 5/5

† EXORCISME † 
▲ Décor
▲ Contexte crédible
▲ Sujet

- DÉMYSTIFICATION - 
▼ Lent
▼ Réaction des protagonistes
▼ Introduction pénible à regarder

LE FLIP
Coincé dans une pièce sans issue, cerné par une armée d'enfants tueurs...


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