[Critique] GOODNIGHT MOMMY (2014/2015) de Veronika Franz & Severin Fiala

Évaluation du dossier : 4/5 [♥]

Au cœur de l'été, dans une maison de campagne perdue au milieu des champs de maïs et des bois, des jumeaux de dix ans attendent le retour de leur mère. Lorsqu’elle revient à la maison, le visage entièrement bandé suite à une opération de chirurgie esthétique, les enfants subissent son hostilité et finissent par douter de son identité…

Goodnight Mommy est un premier long-métrage pour le duo de scénaristes autrichiennes Veronika Franz et Severin Fiala. Difficile de parler du cinéma autrichien sans évoquer Michael Haneke, qui avait traumatisé bon nombre de cinéphiles avec son étouffant et perturbant home invasion, Funny Games.

Alors que Goodnight Mommy lui emprunte son contexte et sa violence naturaliste, on constate très vite que l'originalité n'est pas l'argument premier du métrage. Certes, le mal extérieur qui explose les cloisons du cocon familial sous les traits de deux jeunes sociopathes dans Funny Game cède ici la place à un poison encore plus insidieux puisqu'il prend cette fois sa source à l'intérieur même d'un noyau familial, rongé par un lourd passé.


L'horreur nait progressivement de cette tragédie qui va complètement bouleverser les rapports, désormais toxiques, entre les membres de cette famille. Alors que la figure maternelle, de retour au foyer vient briser et tenter de balayer l'insouciance dans laquelle les enfants baignaient depuis son hospitalisation, sa progéniture commence à douter de la réelle identité de cette femme et s'empêtrer dans le doute au point de chuter vers l'inconcevable. Inconcevable aussi en partie parce que le drame se noue dans un contexte idyllique fait de vacances d'été ensoleillées et de nature comme terrain de jeu.

Si l'aspect manipulation du spectateur apporte la plupart du temps une expérience ludique et enrichissante au cinéma, il fait ici plutôt figure de pétard mouillé puisque les relations entre les deux garçons et les modalités de leur présence à l’écran évoquent très rapidement pour les cinéphiles, des métrages comme L'autre de Robert Mulligan ou encore Deux Soeurs de Kim Jee-Won, chefs-d’œuvre dans leur genre en matière de secrets schizoïdes destinés à paumer le spectateur.


Cependant, malgré ces quelques facilités, Goodnight Mommy s'impose par son côté épuré, son drame intimiste à fleur de peau, son aura mystérieuse, intrigante et parfois angoissante qu'il cultive. Ainsi, la narration lente saisit en douce les tripes du spectateur jusqu'à une dernière bobine aux limites du soutenable durant laquelle le pire et l'impensable se produisent inéluctablement. C'est à ce moment que le film atteint son climax et que la mécanique dichotomique de la folie mise en place par Veronika Franz et Severin Fiala finit par payer, et ce malgré le sérieux manque d'originalité.

Pur produit autrichien sorti de l'esprit quelque peu dérangé de Veronika Franz et Severin Fiala, Goodnight Mommy, n'est pas un film d'épouvante dans le sens "paranormal" du terme. En revanche, l'envie de se cacher les yeux se fait souvent ressentir, tout comme l'espoir que le pire qui se dessine lentement mais surement devant nos yeux n’arrivera finalement pas. En vain...
N.T.


EN BREF
interdit aux - 12 ans 
titre original : Ich seh, Ich seh
pays d'origine : Autriche
budget : petit
année de production : 2014
date de sortie française : 13 mai 2015
durée : 99 minutes
adrénomètre : ♥
note globale : 4/5

 † EXORCISME  †
▲ Approche naturaliste
▲ Éprouvant psychologiquement
▲ Réalisation

- DÉMYSTIFICATION -
▼ Impression de déjà vu
▼ Côté "cinéma d'auteur"qui peut ennuyer
▼ Lent

LE FLIP
Une paire de ciseaux pour découper des lèvres collées à la glue...

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