VIVARIUM (2019/2020) de Lorcan Finnegan [Critique]

Évaluation du dossier : 4/5 []

À la recherche de leur première maison, un jeune couple effectue une visite en compagnie d’un mystérieux agent immobilier et se retrouve pris au piège dans un étrange lotissement...

Avec Vivarium, le cinéaste irlandais Lorcan Finnegan pousse le cynisme à son paroxysme. Il dénonce les travers d'un consumérisme aliénant et dévoile la face immergée de la cellule familiale "modèle".


Tout démarre pourtant bien pour Gemma et Tom, un couple amoureux qui souhaite passer à l'étape suivante avec un projet d'achat immobilier. Cela les conduit très vite chez un étrange agent, vraisemblablement pressé de leur trouver leur nid douillet. En peu de temps, ils se retrouvent à visiter une maison a priori idéale, dans une banlieue pavillonnaire dont ils vont devenir prisonniers. Bientôt, le duo constate que bien plus grave qu'être enfermé dans un lotissement visiblement sans issue, il est pris dans un engrenage social (et familial) duquel il ne peut s'extirper que sous une condition qui parlera à coup sûr aux parents. Mais de l'enfant illégitime à la paternité douteuse, au mari rejeté refusant violemment son sort et qui n'a plus comme source d'espoir que de creuser chaque jour son trou, alors que la mère de famille déphasée veut seulement rendre son quotidien moins insupportable, tout semble fait pour vous dégoûter de la famille, du moins d'une certaine idée de la cellule familiale, dans son acceptation la plus absurde au regard du contexte, avec tout le lot de névroses qui va avec.


Lorcan Finnegan et Garret Shanley, auteurs de ce long-métrage pour le moins barré, aux airs de La Quatrième Dimension, semblent sortir d'une crise d'ado qui dénonce avec cynisme un destin "no future" tout tracé par un contrat social auquel on ne peut échapper. Son but ? Vous pousser à faire votre devoir pour assurer le fonctionnement perpétuel de ce système insidieux. En mode surréaliste, l'air de rien, Finnegan fait résonner cet enfer sur notre propre réalité. Même si le "train-train" quotidien est réduit à une simplicité qui rejoint souvent la figure symbolique, il tend à en souligner davantage les travers (le carton de courses livré quotidiennement, les maisons identiques à perte de vue, le trou creusé dans le jardin, l'enfant égocentré, ou scotché devant l'écran, les parents qui ne comprennent pas ce qu'il regarde, ni, plus tard, ce qu'il comprend finalement du monde...).


La réalisation plutôt froide de Lorcan Finnegan – néanmoins très à l'aise avec son sujet – sous des faux airs d'œuvre monotone, transcrit en réalité à merveille cette vie morne à laquelle nos héros sont condamnés. Interprétés avec brio par Jesse Eisenberg (The Social Network, Bienvenue à Zombieland) et Imogen Poots (28 semaines plus tard, Green Room), le couple fonctionne parfaitement dans sa gestion empirique d'une situation improbable qui les affaiblit et fait souvent vaciller leur cohésion. Leur fils est également parfaitement écrit et interprété par Senan Jennings (Wolf) puis Eanna Hardwicke (Krypton) à l'âge adulte, angoissant de fausse candeur où se tapit un tempérament dangereux et incontrôlable.


Surconsommation, conflit générationnel, conventions sociales, uniformisation des rêves... le réalisateur – qui brise au passage tout rêve d'avenir radieux pour les jeunes couples trop conformistes – mène finement sa barque. Sous forme d'avertissement surréaliste, il déroule sa fable absolument glaçante dans laquelle on finit tous par se reconnaître, dans des proportions variables. Son budget light de quatre millions, qui a de manière générale tendance à exploser le capital débrouille (ce qui est le cas ici !) est aussi le secret de sa réussite. De manière iconoclaste mais avec une vraie intelligence, il parvient à rendre son vivarium angoissant mais passionnant,  ce qui mérite d'autant plus que l'on s'y penche...
N.F.T.



EN BREF
titre original : Vivarium
distribution : Imogen Poots, Danielle Ryan, Molly McCann...
pays d'origine : Irlande / Belgique / Danemark / Canada
budget : 4 000 000 $
année de production : 2019
date de sortie française : 11 mars 2020 - 27 mai 2020 (VOD) - 22 juin 2020 (reprise cinéma)
durée : 97 minutes
adrénomètre : ♥
note globale : 4/5

† EXORCISME †
▲ Idée originale
▲ Casting en béton armé
▲ Réalisation cohérente avec le sujet

- DÉMYSTIFICATION -
▼ Recours à un symbolisme qui peut rebuter
▼ Parfois prévisible
▼ Petite perte de rythme avant la dernière ligne droite

LE FLIP 
La vie de famille...

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