KOKO-DI KOKO-DA (2019) de Johannes Nyholm [Critique]

.Évaluation du dossier : 4.5/5 []

Pour surmonter les problèmes que traverse leur couple, Elin et Tobias partent camper au cœur de la forêt suédoise. Mais des fantômes de leur passé resurgissent et, plus que jamais, les mettent à l'épreuve.


Après s'être fait les dents dans le monde du clip et du court-métrage, Johannes Nyholm livre son premier long-métrage. Une proposition artistique saisissante et gonflée comme l'on aimerait en voir plus souvent...

Original, loin des bobines commerciales bien propres sur elles, Koko-di Koko-da est la preuve flagrante que la créativité et la vraie prise de risque ne sont pas encore tout à fait mortes au cinéma. Ce qui tend à rassurer. Un constat positif doublé d'un autre tout aussi réjouissant – bien qu'un poil chauvin – puisque la source d'inspiration du réalisateur est une comptine de chez nous, "Le coq est mort", naïve et effrayante à la fois, qui devient ici un leitmotiv, véritable moteur de tension du film et qui cristallise les dysfonctionnements de ce couple en perdition depuis le décès tragique de leur unique enfant trois ans plus tôt.


À partir de ce matériau de base, Johannes Nyholm livre un conte parfois drôle, souvent cruel sur les problèmes de communication dans le couple, utilisés ici comme prétexte à l'horreur qu'ils doivent subir au fond des bois, sous forme de cercle vicieux dont ils semblent incapables de s'extraire, faisant systématiquement les mauvais choix. On songe alors aux références du genre, d'Un jour sans fin à, plus récemment, Happy Birthdead et tous ces films dont les protagonistes doivent s'extirper d'une boucle qui se répète à l'infini. Assez cryptique dans sa manière d'aborder son histoire, c'est au spectateur de comprendre à partir des éléments qui lui sont donnés, le sens de tout cela. Comptine enfantine, chat mystérieux, théâtre d'ombres, trio étrange parcourant les bois en chantant... comme dans un conte cruel, l'horreur côtoie la poésie et donne à l'ensemble un aspect étrange, hallucinatoire, entre rêve et réalité. Un sentiment renforcé par la photographie de Tobias Höiem-Flyckt et Johan Lundborg qui ont dû composer avec des conditions de tournage difficiles (intempéries, journées courtes...) ce qui conduira à cette lumière étrange retravaillée en postproduction, que l'on voit tout juste avant le lever du jour et qui renforce le côté onirique de la situation.


Au niveau du casting, il était important de ne pas se planter tant les personnages traversent des situations extrêmement difficiles et doivent adopter des comportements et réactions qui peuvent sembler farfelus. Leif Edlund (Jätten, Tom of Finland) endosse le rôle du mari lâche et Ylva Gallon (Isolerad) celui de l'épouse contrariée. Il s'agit d'acteurs peu connus chez nous, mais le duo fonctionne parfaitement à l'écran et avoir déjà travaillé ensemble sur un autre projet n'est sans doute pas étranger à cela. C'est Peter Belli, icône du rock'n'roll suédois des sixties aux côtés de "Les Rivals" qui se charge d'incarner l'homme en blanc, meneur d'un trio bizarre et violent constitué aussi d'un ogre et son chien et d'une femme à la coupe de cheveux cintrée.


Un peu répétitif (concept de base oblige) mais jamais ennuyeux, cryptique mais très accessible, Koko-di Koko-da est une expérience cinématographique assez étrange où se mêlent à merveille humour et cruauté. Johannes Nyholm, à renfort de comptine entêtante, de mystère sylvestre et d'images animées la consolide avec une poésie omniprésente offrant une dimension touchante au drame sentimental, parfois malaisant, qui se joue. Sans vraiment effrayer, il sait jouer des tensions et son trio de promeneurs des bois dangereux, digne d'un trip sous champignons hallucinogènes en forêt, fait le boulot avec son apparence guillerette en contradiction avec sa pure et implacable méchanceté. Koko-di Koko-da s'affirme comme une sortie incontournable pour les amateurs d’œuvres personnelles, originales, dépaysantes, flirtant avec l'absurde, proches du film d'auteur mais jamais ennuyeux.
N.F.T.



EN BREF
titre original : Koko-di Koko-da
distribution : Peter Belli, Leif Edlund, Ylva Gallon...
pays d'origine : Suède / Danemark
budget : N.C.
année de production : 2019
date de sortie française : 13 novembre 2019
durée : 86 minutes
adrénomètre : ♠
note globale : 4.5/5

† EXORCISME †
▲ Idée originale
▲ Casting
▲ Réalisation

- DÉMYSTIFICATION -
▼ Univers clos
▼ Forcément un peu répétitif
▼ Cryptique

LE FLIP
Des gens bizarres dans les bois...

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