[Critique] ALONE (2015/2016 - DTV) de Thierry Poiraud

ADRÉNOMÈTRE   
NOTE  TV TV TV TV TV 

Sur une île isolée au large de l’Écosse, six adolescents se réveillent seuls dans leur pensionnat. Alors que l'équipe d'encadrement semble avoir disparu, ils finissent par prendre la route, en quête de réponses. Ils découvrent bientôt que les habitants sont infectés par un virus inconnu les transformant en prédateurs sanguinaires. Pire, le fléau semble toucher uniquement les adultes. Dès lors, deux questions s'imposent à eux : comment quitter l’île ? Et à quel âge devient-on adulte ?
 

Sur le principe inverse des Révoltés de l'an 2000 de Narciso Ibáñez Serrador, Alone – curieuse traduction "française" de Don't Grow up – s'intéresse au délicat passage de l'enfance à l'âge adulte, cristallisé ici en une mutation destructrice qui mène le monde au chaos.

Thierry Poiraud, l'un des fameux frères à l'origine du délirant Atomik Circus, le retour de James Bataille, se retrouve cette fois seul à bord sur ce projet ambitieux qui s'intéresse au délicat passage à l'âge adulte et à ses conséquences sur l'enfance qu'il dévore petit à petit. C'est sous ce prisme qu'Alone aborde le thème des enfants tueurs, puisque ces derniers le deviennent ici par pur instinct de survie face aux adultes devenus nocifs pour eux et l'humanité.


Entre ce fameux passage à la maturité qui transforme les kids en prédateurs sanguinaires et une situation d'urgence qui oblige les ados à passer plus vite à l'étape supérieure afin de mieux se préserver, il y a au final un contexte chaotique qui se met en place et d'où suinte un sentiment de désespoir poisseux. Le groupe d'adolescent parait très vite menacé par le virus et on s'interroge sur le mystérieux processus qui les fait basculer de l'autre côté. Cependant, de manière plus générale, Thierry Poiraud se garde bien d'être trop explicite, souvent au risque de laisser le spectateur face à quelque chose d'assez opaque, difficile à appréhender.

Dans la forme, on retrouve un peu de cette frange made in France ambitieuse mais qui souffre de son manque de budget et d'un développement insuffisamment poussé. Aux yeux des vivants de Julien Maury et Alexandre Bustillo était un peu dans le même cas. Il parvenait à dresser un décor et un contexte pour le moins convaincant mais malheureusement pas suffisamment mûr en terme d'écriture. On ne peut néanmoins qu'apprécier l'engagement de ces réalisateurs qui cultivent aussi dans leurs œuvres au-delà d'une cinéphilie prononcée pour le genre, un certain goût pour le "réalisme" cru, dans la vie comme dans la mort, qui peut s'abattre sur n'importe qui, sans limite d'âge.
 

Si l'horreur côtoie les scènes plus intimistes, voire d'auteur, notamment dans son approche de la relation entre Bastian et Pearl, Alone aurait gagné à approfondir et développer davantage ses thématiques ne serait-ce que pour s'extirper du film d'infecté de base sur fond de catastrophe. Pourtant la vie de ce groupe sympathique de jeunes paumés, désœuvrés, sans repères et déjà bien marqués par la vie – et la mort – intrigue. On comprend bien que l'important ici n'est pas tant l'origine de l'infection, ni l'état dans lequel elle laisse l'humanité, que le détonateur qui cause ce déchaînement de violence.

Le problème est qu'avec un thème pareil, il devient difficile de faire vraiment peur tant le sujet est aujourd'hui omniprésent dans les jeux vidéo depuis Resident Evil et à la télévision avec la série populaire The Walking Dead. Thierry Poiraud fait aussi le choix de filmer de manière brute, sans insérer d'effets de mise en scène propres à créer la peur, et cela même si un certain malaise se ressent toutefois, notamment lors des nombreuses scènes d'exécutions.
 

Sur un scénario de Marie Garell-Weiss (Goal of the Dead, Atomik Circus, le retour de James Bataille, Propriété Interdite) Alone s'articule autour d'un mystère apocalyptique un peu frustrant : on ne comprend pas toujours ce qu'il s'y passe, pas plus qu'on ne perçoit toujours les intentions du réalisateur. Cependant, l'ensemble n'est pas à jeter, loin de là. À commencer par la réalisation inspirée au service d'une photographie réellement bluffante qui nous plonge au cœur de cet univers apocalyptique. Ponctué de moments un peu suspendus, que les mauvaises langues qualifieront d'ennuyeux, il décuple de cette manière l'intensité des séquences fortes. Au final, on regrette seulement que tout cela ne mène pas à grand chose, comme si le métrage avait été amputé de séquences importantes et du coup d'une partie de sa grille de lecture. L'explication, sur fond de bonne nouvelle, étant l'annonce faite par le réalisateur au sujet d'un projet de série en cours de développement.
N.F.T

 EN BREF
titre original : Don't grow up
pays d'origine : France / Espagne
budget : 2 000 000 $
année de production : 2015
date de sortie française : 1 avril 2016 (E-cinema) / 8 avril 2016 (DTV - Condor Entertainment)
durée : 81 minutes
adrénomètre : ♠
note globale : 2.5/5

† EXORCISME †
▲ Photographie
▲ Décors
▲ Thème

- DÉMYSTIFICATION -
▼ Casting pas toujours juste
▼ Lent
▼ Impression d'inachevé

LE FLIP
Une rencontre inopinée à la station service...

LIRE AUSSI
Come out and play
Cub
The End

Commentaires

En cours de lecture