[Critique] FRANKENSTEIN (1931/1932) de James Whale

ADRÉNOMÈTRE  ♠ 
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Henry Frankenstein est un homme de science ambitieux. Avec son assistant Fritz, il s'est retranché du monde, dans une tour en ruine, aux abords d'un village d'Europe centrale. Là, il a pour projet de donner vie à un homme créé de ses mains, à partir de morceaux de cadavres. Mais son isolement inquiète beaucoup sa future épouse Elizabeth, son père et son ancien professeur d'Université. Tous font pression sur Henry pour qu'il abandonne ses activités, d'autant que ses noces n'attendent plus qu'à être célébrées. Mais la créature à laquelle il a donné vie tue bientôt Fritz...

Moins d'un an après le Dracula de Tod Browning, le studio Universal sortait la grosse artillerie avec ce premier Frankenstein parlant, mis en scène par James Whale.

Si le cachet théâtral demeure, principalement dû à certains extérieurs filmés en studios, les intonations surjouées qui faisaient la force mais aussi la faiblesse du film de Browning, sont délaissées au profit d'une interprétation plus naturelle.
Hormis le studio et le genre auquel il appartient, certains acteurs font aussi le lien entre les deux films. À savoir Fritz, l'assistant fou, interprété par Dwight Frye, déjà employé sur un rôle similaire dans Dracula, puisqu'il y interprétait Renfield, il enchaînera par ailleurs les rôles de dérangé. On note également le retour d'Edward Van Sloan qui passe de Van Helsing au Dr Waldman. Et bien sur Boris Karloff, considéré comme le seul et unique Frankenstein, qui offre une interprétation riche, d'un monstre naïf, maladroit et touchant. Difficile, en effet, de ne pas sentir une certaine empathie face un personnage victime de l'inconscience d'un médecin, de la cruauté de son assistant et plus tard d'actes irréversibles qu'il commet et dont la responsabilité incombe à un créateur irresponsable qui abandonne sa création à son professeur, au profit de son petit confort et de son mariage.



Cette adaptation prend de nombreuses libertés par rapport au roman, comme l'ajout du personnage de Fritz, l'assistant fou, aussi en invoquant ouvertement la science pour faire vivre la créature, ou encore en présentant cette dernière comme dénuée de parole. On note un second degré très présent et bienvenu au sein de thématiques plus sombres. Le film de James Whale confronte souvent le thème de la vie et de la mort et fait cohabiter lumière et ténèbres. L'une des scènes les plus marquantes, à ce titre,  étant sans doute celle où ce père de famille porte le corps noyé de sa fille sur la place d'un village en liesse.

Offrant de superbes décors et des matte painting remarquables, Whale livre une mise en scène aux plans et cadres soignés. On retiendra notamment son travail sur la verticalité du film, remplissant l'image de bas en haut. L'absence de musique n'est quant à elle pas vraiment préjudiciable, puisqu'elle permet, d'une part, de mieux se concentrer sur les personnages, mais aussi parce qu'il n'est pas rare qu'un film souffre d'une bande son trop démonstratrice, ou trop ancrée dans son époque (les affreuses bandes originales électro à vocation tube FM, surfaites des années 80 n'ont pas toujours rendu service aux films, pas plus que les bandes sonores composées à posteriori sur certains classiques, dénaturant davantage l’œuvre).


Sorti après la version de Thomas Edison de 1910 et celle de 1915, le muet Life Without Soul, désormais disparu, Frankenstein s'inspire beaucoup du film d'Edison pour ce qui est du maquillage de la créature, mais aussi du Golem de Paul Wegener (1920) et du Cabinet du docteur Galigari (1920) de Robert Wiene. Évoluant entre une forme expressionniste et un fond plus moderne, c'est, en effet, la science qui donne vie au monstre, alors qu'aux décors contemporains (à 1931), viennent se greffer d'autres éléments plus anciens.

Malgré les incohérences et les questions souvent soulignées, et à raison : comment le père sait-il que sa fille est assassinée ? Comment la créature de Frankenstein sait où ce dernier se trouve... Frankenstein demeure un classique que le temps à conforté dans son statut d'indétrônable. De par ses thématiques, sa portée historique, mais plus simplement parce qu'il est une vraie réussite artistique. Et s'il ne fait plus peur, pour les raisons évolutives que l'on imagine aisément, l'interprétation de Karloff fascine toujours autant et l'acteur, 85 ans plus tard, semble  éternellement associé à ce personnage.
N.T.

EN BREF
titre original : Frankenstein
pays d'origine : États-Unis
année de production : 1931
budget : 291 000 $
date de sortie française : 17 mars 1932
durée : 70 minutes 
 adrénomètre : ♠
note globale : 4/5 


† HANTISE
▲ Un classique fondateur
▲ Réussite artistique
▲ Fascinant Boris Karloff

 -  DÉMYSTIFICATION -
▼ Quelques incohérences
▼ Léger coup de vieux
▼ ...

LE FLIP
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