Rendez-vous avec la peur (1957) de Jacques Tourneur

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Le professeur Harrington, qui dénonçait les activités du docteur Julian Karswell dans le domaine de la démonologie, trouve la mort dans un étrange accident de voiture. Son collègue, le savant américain John Holden, venu à Londres participer à un congrès de parapsychologie, enquête sur sa disparition. Il est aidé dans ses recherches par Joanna, la propre nièce du défunt. Holden rend visite au docteur Karswell, qui l’informe qu’Harrington aurait provoqué, par son scepticisme, des forces surnaturelles qui ont eu raison de lui. Karswell tente de convaincre le savant de ses pouvoirs en déclenchant un ouragan, mais ce dernier demeure sceptique...

C'est une voix bien ténébreuse qui accueille le spectateur pour ce Rendez-vous avec la peur, un peu similaire à celle de La Maison du Diable, qui sortira sept ans plus tard. Une mise en situation plutôt efficace, renforcée par des plans tournés au cœur des mystiques mégalithes de Stonehenge, situés dans la plaine de Salisbury en Angleterre. Bientôt plongé dans les ténèbres d'une forêt menaçante, on comprend vite le talent de Jacques Tourneur pour créer et entretenir malaise et sentiment d'insécurité.

Cette série B, tournée en Grande-Bretagne s'intéresse de près à la sorcellerie et au paranormal,  se déclinant en une confrontation constante entre les sceptiques et les croyants, entre les pratiquants et les démystificateurs. Heureusement pour nous, le film se range du côté des croyants Tourneur était lui-même convaincu de l'existence des forces occultes et offre quelques jolis moments de fantastique, old school certes, mais qui se dégustent avec tout autant de plaisir nostalgique qu'un bon épisode de La Quatrième dimension.


À noter l'influence visible et considérable de Rendez-vous avec la peur, consciente  ou non, sur de multiples films qui sortiront par la suite et parmi lesquels figurent de sérieux chefs-d’œuvre. Qu'il s'agisse d'une malédiction fonctionnant sur le même principe que Jusqu'en enfer, de la voix caverneuse d’introduction évoquant La Maison du diable de Robert Wise, de la mort programmée de Ring, ou encore de l'homme réduit à l'état de marionnette même s'il n'en a ici que l'apparence dans la main du monstre géant et des incantations, vues dans Maléfiques d'Éric Valette, qui par ailleurs nous confiait à l'époque de sa sortie, avoir été terrifié par Rendez-vous avec la peur.

Côté effets spéciaux, difficile de ne pas regretter, tout comme le réalisateur alors contraint par un producteur zélé, l'apparition prématurée d'un monstre peu convaincant, avec sa tête de chien de l'enfer, et qui peut, en effet, prêter à sourire. Malgré ce petit défaut, additionné à une poignée d'autres plans cheap, comme une attaque de chat muté en une panthère étrangement raide lors du combat, ou des fils mal dissimulés pour faire voler dans les airs un morceau de papier, l'ensemble demeure efficace, surtout au regard de son âge et de son statut de classique influent, au même titre que La Féline, sorti en 1942. L'intrusion systématique d'une main dans le champ, les scènes filmées de nuit dans les bois, la séance d'hypnose, l'utilisation virtuose de la suggestion, les jeux d'ombre, le traitement psychologique des personnages sont a contrario autant de réussites à mettre au crédit de l’œuvre. Auréolé d'une véritable réputation de bricoleur, le tout Hollywood connaissait les capacités de Tourneur pour exploiter au mieux les scénarios banals, voire médiocres.

Plus d'un demi-siècle après sa sortie, Rendez-vous avec la peur demeure un remarquable film d'angoisse, porté par cette volonté du réalisateur d'injecter un peu de sa foi [SPOILER] en faisant virer un cartésien sceptique en un être superstitieux et méfiant. Ce qui sera confirmé par la réplique finale du personnage principal, affirmant à ce sujet qu'il est préférable d'en savoir le moins possible...
N.T.

En bref :
titre original : Night of the Demon / États-Unis : Curse of the Demon
pays d'origine : Grande-Bretagne
année de production : 1957
date de sortie française : 1957 / reprise le 31 mars 2004
durée : 95 minutes / 82 minutes
adrénomètre : ♠
note globale : 3.5/5


Le flip : Le professeur Harrington est poursuivi par un démon, la nuit au milieu des bois.



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