[Critique] TEDDY (1981/1982 - VHS) de Lew Lehman

Évaluation du dossier : 2.5/5 []

Jamie est un jeune garçon de 12 ans solitaire, introverti et véritable souffre douleur de ses petits camarades. Pour ne rien arranger, il tombe amoureux de sa babysitter qu'il tente de séduire, sans résultat. Dans les épreuves qu'il traverse, son seul et véritable ami pour l'aider est Teddy, son ourson en peluche maléfique. Un jour, ce dernier lui souffle une idée radicale pour se débarrasser de ceux qui le maltraitent.

Avec Teddy, on fleure très vite le projet fauché. Toutefois, loin de réduire les ambitions du réalisateur Lew Lehman à néant, elles demeurent intactes du début à la fin du métrage, au point, pour ce dernier, d'atteindre un niveau de singularité qui interpelle et rend l'ensemble assez intrigant dans sa globalité, malgré un coup de vieux évident.

Dans sa première partie, Teddy s’attache à décrire le mal-être de Jamie, cet adolescent "trop curieux" qui commence à s'éveiller aux mystères de l'autre sexe. Fou amoureux de sa babysitter, il lui avoue sa flamme et partage ses petits secrets avec elle. Mais la belle ne semble pas sensible à ses petites attentions, bien au contraire. En même temps c'est sûr que lui annoncer l'existence de trolls ou parler tout seul dans sa chambre, n'est pas forcément le meilleur moyen pour la séduire.


Du coup, le gamin devient encore plus tordu et se fait entrainer par son cher Teddy d'ours en peluche dans une spirale meurtrière. Loin d'être l'unique personnage central comme le suggère la jaquette du DVD avec son nounours aux yeux flashy, il est aussi question d'un trou en pleine forêt peuplé de trolls affamés. Rejeté, humilié, pas tout à fait bien dans ses baskets et sur conseil de son ourson un peu inquiétant sur les bords, l'enfant finit par joindre l'utile à l'agréable en faisant de ceux qui lui pourrissent la vie des mets pour ses nouveaux amis carnivores. Ce qui entraine, dans la foulée, quelques scènes cocasses, dont le mémorable enlèvement d'une mamie en fauteuil roulant. Mais c'est aussi l'occasion de déterrer des dialogues aux petits oignons, aujourd'hui bannis à tout jamais du cinéma d'horreur :"Oh Freddy, je n'irai pas plus loin, j'ai peur de cet endroit, j'ai peur qu'il m'arrive quelque chose" gémit ainsi une jeune fille en tutu angoissée en pleine nuit au fond des bois.

Vous l'aurez compris, Teddy est une de ces œuvres très marquée par son époque et que l'on tourne facilement en dérision. Cependant, si l'on oublie son scénario et ses dialogues simplistes et un certain nombre de séquences qui relèvent de l'improbable – et la résolution finale ne viendra rien éclaircir –  c'est surtout une recherche d'originalité, d'identité propre à partir de l'existant qui semble dominer ici. Alors forcément, on pense à une multitude d’œuvres qui couvre un spectre des plus larges allant de L'Autre de Robert Muligan au cultissimement nul Troll 2 de Claudio Fragasso, en passant par le slasher et autres joyeuses bisseries italiennes. D'ailleurs on ne s'étonne qu'à moitié qu'il s'agisse là de l'unique réalisation de l'acteur scénariste Lew Lehman (Phobia) décédé en 2000 dans l'indifférence génrale.


Si le mystère est entier autour de ce one shot cinématographique, il faut bien admettre qu'il peine, au premier abord, et pour les plus jeunes, à se laisser séduire. Interprétation approximative, incohérences du scénario, dialogues et VF improbables (le doublage d'Alicia dans les dernières minutes par une adulte vaut vraiment le détour). Heureusement, de ce délire modéré émerge quelques chose de fascinant. On nage en plein délire avec cette histoire de nounours qui parle, de trolls affamés découverts inopinément dans un trou au milieu d'une forêt, mais aussi de ce garçon inquiétant, sans doute un peu en prise avec l'autisme, qui passe pour un pervers. Mais on finit par passer un bon moment de détente face à cet ovni cinématographique qui a toutefois le mérite d'être sincère du début à la fin. D'autant que les effets spéciaux certes, limités, nous rappellent forcément le travail à l'ancienne, à coup de costumes et de maquillages qui font ressembler les trolls à un improbable mélange entre les Ewoks et les monstres de Chromosome 3.

Si les intentions de Teddy demeurent un peu trouble, c'est un peu la faute à un univers sans frontière apparente, qui accueille aussi bien des trolls, que des enfants psychotiques, des nounours parlants, des spectres effrayants...  pas simple de savoir au fond à quoi l'on a affaire. On regrette également que les rapports entre l'enfant et Teddy soient aussi peu exploités alors que le film porte le nom de l'ourson. Cependant on apprécie l'efficacité de certaines scènes comme les apparitions spectrales cauchemardesques qui effraient Jamie ou encore ces scènes de malaise autour de l'expression perturbée de la sexualité naissante du garçon, qui ont aussi l'avantage de justifier un quota de "nichons" que l'on suppose syndical pour le genre et pour l'époque.


Évoquant notamment la souffrance de l'isolement, la cruauté et la perversité potentielle des enfants, Teddy parle aussi du sentiment de vengeance et s'achève en une fable ironique et cruelle. C'est aussi le témoignage d'une époque d'un cinéma fauché, maladroit mais sincère, et même s'il a pris un gros coup de vieux, se laisse visionner comme un vieux classique en noir et blanc. Teddy est à réserver à un vrai public averti et surtout aux curieux chez qui il rappellera une certaine idée de la série B à l'ancienne, audacieuse et flirtant parfois aussi avec le Z
N.F.T.

EN BREF
titre original : The Pit
titre alternatif : Teddy la mort en peluche
pays d'origine : Canada
budget : 770 000 $
année de production : 1981
date de sortie française : 1982 (VHS - VIP International) / 17 mai 2016 (DTV - Zylo)
durée : 90 minutes
adrénomètre : ♠
note globale : 2.5/5

† EXORCISME †
▲ Traitement original
▲ Audacieux
▲ Sans limites

- DÉMYSTIFICATION -
▼ L'ours en peluche
▼ Fauché
▼ Doublages VF

LE FLIP
Les apparitions spectrales

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