La Guerre des Mondes (2005) de Steven Spielberg [Critique]

ADRÉNOMÈTRE  ♡ 
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Ray Ferrier est un docker divorcé et un père à la ramasse qui n'entretient plus que des relations épisodiques avec son fils Robbie, 17 ans, et sa fille Rachel, 11 ans. Quelques minutes après que son ex-femme et l'époux de cette dernière lui ont confié la garde des enfants, un puissant orage éclate. Ray assiste alors à un spectacle qui au-delà de profondément bouleverser le monde, va changer à jamais sa vie...

Si Steven Spielberg étonne ici, et bien qu'on reconnaisse sa patte, c'est que, pour la première fois, il traite du thème des aliens sans une once de pacifisme. Le réalisateur, qui profite de ce remake du film de 1953, inspiré du roman de H.G. Wells, pour réintégrer et moderniser le concept de base, dépeint les rapports compliqués au cœur d'une famille et utilise ce contexte extraordinaire pour les rapprocher.
Et comme dans Rencontres du Troisième Type, où l'on retrouve cette figure du père immature, interprété alors par Richard Dreyfuss, c'est cette fois Tom Cruise qui endosse le pathétique costume du père indigne. Un anti-héros dans toute sa splendeur, visiblement davantage passionné par son travail de docker et sa voiture que par ses enfants avec lesquels il s'avère complètement à la rue. D'ailleurs, même la photo légèrement granuleuse et surexposée de Janusz Kaminski semble souligner l'état psychique de Ray Ferrier, étourdi par ses heures de boulot nocturne, obligé de dormir peu et pas vraiment (ou alors mal) investi dans l'éducation de ses enfants. Et il faut bien avouer que le spectateur éprouve un certain plaisir coupable à observer ce tombeur loser courir terrifié, le corps et le visage enfumés, mais surtout blanchis par les vagues de cendres d'humains fraîchement désintégrés par l'envahisseur. Une scène qui, comme quelques autres, évoque non seulement le drame du 11 septembre mais semble aussi se faire l'écho de l'holocauste. Fruit du hasard ou manifestation de l'inconscient collectif ? Toujours est-il que cet événement exceptionnel va réveiller chez ce personnage l'instinct protecteur du père qu'il lui a jusqu'alors fait défaut. Commencera alors une lutte acharnée pour conserver coûte que coûte l'enfance de sa fille.


Assez violent dans sa forme, on y retrouve au-delà de la menace du monstre des Dents de la Mer ou Jurassic Park, l'intensité dramatique d'une guerre déséquilibrée, car contrairement à Il Faut Sauver le Soldat Ryan, les forces américaines sont et resteront cette fois totalement impuissantes face aux machines gigantesques et intouchables de l'ennemi [spoiler du moins tant que le nature n'aura pas décoincé d'elle-même la situation. Spielberg maîtrise son sujet et ne se bride jamais, quand l'envahisseur fertilise la terre avec du sang humain ou quand le personnage de Tom Cruise choisit une solution extrême envers un congénère pour assurer la sécurité de sa fille,] le réalisateur va jusqu'au bout de cette froide réalité mue par les intérêts des extraterrestres et par l'instinct de survie de Ferrier. 

Enfin, le film n'est pas exempt de légères incohérences, du moins de bizarreries, comme lors de cette scène du panier de stockage d'humains fixé en altitude à l'une des machines et qui s'écroule sur un arbre sans abîmer personne, ou même au sujet de l'une des questions centrales du film, lorsque l'anti-héros laisse partir son entêté de fils un peu facilement, au lieu de lui foutre son pied au cul, même si Ferrier est antipathique et égocentrique, la situation sonne étrangement faux.

À noter, au-delà des performances de Tom Cruise et de la jeune actrice Dakota Fanning, la présence de deux acteurs du film de 1954, Ann Robinson et Gene Barry dans  le rôle des grands-parents. 
La Guerre des Mondes s'impose au final comme un excellent cru du maître, parfaitement rythmé, enlevé, généreux en effets spéciaux, avec tout le talent de faiseur d'images qui caractérise Spielberg. Pour une nouvelle lecture de l'invasion extraterrestre à la sauce catastrophe, paradoxalement intimiste, désespérée et touchante.
N.F.T.

En bref :
titre original : War of the Worlds
pays d'origine : États-Unis
année de production : 2005
budget : 132 000 000 $
date de sortie française : 6 juillet 2005
durée : 116 minutes
adrénomètre : **
note globale : 4.5/5

Le flip : Sorti de terre, l'envahisseur tire à vue sur toute la population.



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